Par
Kamika Michiyo dans
Textes en vrac le
21 Mars 2009 à 11:54
Il entra, obligé de se courber en deux comme un gros ours, car il était presque un géant. Il avait de larges épaules, on devinait des muscles puissants sous son épais tricot de laine bleue. La peau tannée par les embruns et le soleil, la démarche chaloupée des marins aguerris, et surtout cette lueur sauvage dans son regard fuyant le rendait intimidant. Il sa glissa à côté de Sylvestre, prit son verre de rhum et trinqua à la santé du navire et de ses matelots. Sylvestre plaisanta sur ce qu'il faisait dehors à cette heure là. Yann redevint sombre, et, quelques minutes plus tard, allait se coucher.
Le lendemain matin, il rejoignit son poste de pêche comme si rien ne s'était passé la veille. Il commença à pêcher; D'un coup sec, il ferrait le poisson, le sortait de l'eau, le jetait sur le pont pour celui qui allait le préparer à être conservé et il recommençait. Ca allait vite, ils passaient près d'un énorme banc de morues. Peu à peu, le jour commença à poindre, révélant un brouillard épais, ouaté. Les pêcheur n'étaient qu'à trois mètres les un des autres mais ils ne se voyaient déjà plus. Et ils continuaient à pêcher en silence. Dès que la relève eut sonné, ils se rassemblèrent pour discuter. Il était question de femmes et de mariages, sans rien dire qui fut déshonnête. Un des hommes fit une plaisanterie :
"Eh, Yann, quand vas-u te choisir une demoiselle ?"
L'homme n'y songeait pas :
"Non, pas encore..."
Et il se referma comme une huître. Son regard étincela, puis il partit sans mot dire.